ONIRIS, L'homme Voilier (1979)
ONIRIS (reprise d'une ancienne chronique)
Oniris est un projet d'Alain Gallet, mais avant d'en parler il faut faire un
petit retour en arrière.
Au début de années 70 Alain Gallet a déjà à
son actif deux très bons albums de folk progressif: Alain Gallet (1973) et
Naufrage (1974) dans l'esprit ce ceux de John Renbourn et de son groupe
Pentangle qu'il affectionne particulièrement.
Conjointement à cette passion pour le folk, Alain Gallet apprécie également
le rock progressif et tout particulièrement Genesis et son chanteur Peter
Gabriel.
La sortie de « The lamb lies down on broadway » en 1974 ne
fait qu'accentuer cette envie de former avec Joël Lebossé (guitariste sur
l'album Naufrage) un groupe plus électrique et de créer un spectacle à la
fois musical et théâtral cependant l'idée restera en suspens car en 1976
Alain Gallet propose sans grand espoir à Radio Armorique un projet
d'émission rock et celui-ci est à son grand étonnement retenu.
L'émission
Sextant voit donc le jour cette même année et il l'animera jusqu'en
1983.
En 1978 l'envie de mener à bien son idée provisoirement mise de coté reprend Alain Gallet qui écrit alors l'histoire de « L'homme voilier ».
Le groupe Oniris est formé par (voir la photo d' entête) :
Au premier plan : Gilles Hinterseber (basse), Alain Gallet (chant
percussions), Joël Lebossé (guitare), Norbert Périaut (guitare).
Derrière,
de gauche à droite : Thierry Tual (batterie), Rémy Hubert( claviers).
Le groupe s'investit énormément en faisant beaucoup de répétitions (pas
toujours simples à organiser vu le nombre de musiciens) pour parfaire
l'interprétation des titres très sophistiqués et la mise en place du
spectacle.
Alain Gallet fait écouter une maquette des titres d' Oniris
à Dan Ar Braz lors d'un de ses passages à radio Armorique en tant qu'invité
de l'émission radiophonique Sextant.
A son tour Dan Ar Braz transmet la
maquette à Laurent Thibault (ingénieur du son au Château d'Hérouville) qui
intéressé par le projet propose au groupe de signer avec Barclay pour
enregistrer l'album.
Le groupe voit alors ce contrat comme un véritable
conte de fée d'autant plus que le deal avec Barclay est de recevoir du
matériel permettant de mettre le show en place sur scène.
Les sessions
d'enregistrements au château d'Hérouville se passent sans problème et
l'album « L'homme voilier »sort en 1979 sur le label Barclay avec une
pochette magnifiquement illustrée par un dessin d'Alain Ranou.
Malheureusement la désillusion arrive assez vite car Barclay ne tient pas
ses engagements . Ceci entraîne des difficultés pour mettre en place le
spectacle qui demande beaucoup de matériel (instruments, amplis et sono) et
tel un cirque ambulant des moyens de transport non négligeables.
Qu'importe
le spectacle se met en place mais nécessite des scènes assez grande pour
pouvoir placer les six musiciens un écran en arrière plan et un hippocampe
géant (Guénolé).
Je vous rapporte les propos d'Alain Gallet concernant
la mise en scène et l'origine du nom du groupe.
« Guénolé avait été
fabriqué par Yann Kersalé (qui sortait des Beaux-Arts), inspiré du dessin
d’Alain Ranou (qui deviendrait psychanalyste…). Et le show incluait à des
instants précis des projections sur grand écran des dessins du même Alain
Ranou, lesquels proposaient un univers « fantastique » très coloré et
foisonnant, illustrant certains propos de Guénolé (Venise, la Roue des
marées, etc). Enfin, par ailleurs, je chantais dans un micro dissimulé dans
une mouette taxidermisée ! Bref un univers très onirique… d’où le nom du
groupe, un néologisme dont j’étais un peu fier à l’époque (et déposé à
l’INPI !!!) »
Yann Kersalé assurait la mise en lumière de la scène,
contrôlait Guénolé (qui s'illuminait quand il prenait la parole) et gérait
la synchronisation des projections en arrière plan.
Ci-Dessous un des
magnifiques dessins d'Alain Ranou servant pour les projections.
Oniris et son rock progressif considéré comme un peu dépassé sera invité à la première édition des rencontres
trans-musicales de Rennes en juin 1979 et sera noyé au milieu d'une programmation new wave, rock et expérimentale très en vogue à cette époque.
Cependant le groupe n'est pas dupe, étant le seul groupe local pouvant prêter le matériel nécessaire à l'existence même de cette première édition, l'invitation était un peu forcée.
Dans la vidéo ci-dessous vous pouvez apercevoir l'installation de Guénolé ainsi qu' Alain Gallet et Rémy Hubert sur la scène des rencontres trans-musicales de Rennes en 1979.
Le groupe ne fera que quelques concerts et épuisé par la difficulté de gérer
les répétitions et la fatigue cessera en 1980.
Exhumée des archives de
Yann Kersalé voici une photo très rare du groupe en concert à la maison de
la culture de Rennes le 31 novembre 1979.
L'album musicalement
« Schizologue » : A une ambiance bord de mer suit une magnifique introduction (M Loyal), dominée par les claviers, qui monte en puissance avec l'arrivée des guitares majestueuses et des percussions.
Suit une alternance de dialogues entre Schizo soutenus par un jazz rock énergique et Guénolé l'hippocampe qui ramène de la douceur avec une musique subtile, réminiscence de Genesis, de CSN, de Ange et de Magma
« L'homme voilier » rêve, délire et naufrage: Dans ce titre les propos de Schizo (rêve ou pseudo réalité) reposent alternativement sur une musique onirique et de brefs passages magmaiens avant le chaotique naufrage.
« Le rêve et le quotidien » raconte toi...: Une musique très complexe pour accompagner le combat de Schizo avec le monde médical oscillant entre jazz rock musclé et funk et devenant plus apaisée lors des interventions de Guénolé.
Moi Alain... clôture l'album par une montée en puissance de la musique jusqu'à une frénésie totale avant de retrouver une grande sérénité ponctuée comme dans l'ouverture de l'album par le hennissement de notre cheval marin retrouvant la mer et le bruit des vagues apaisantes. Chronique du disque – (textes par Crapou)
Hé oui, tout en déambulant dans sa ZUP Sud, notre pauvre Schizo dialogue avec Guénolé, son hippocampe cérébral de compagnie... Que c’est triste la ville côté zone. Marre du béton, marre du bistrot avec son juke-box disco, marre de ces filles qui rigolent... Guiness, gin...voire un peu plus….ça flippe, ça tangue, ça trébuche, ça rêve de partir...foutre le camp…chevaucher les flots…
Après tout nous sommes en Bretagne et, tel le chouchen, la mer n’est jamais loin et ça y est notre Schizo prend le large… C’est sûr, c’est son fidèle Guénolé qui l’entraîne au fil de l’eau. Il est l’homme-voilier...ce n’est plus un rêve…ça fend les vagues...ça galope….ça dérive... ça délire grave...ça s’envole...ça plane...ça tutoie le soleil à s’en brûler les voiles !
C’est le naufrage, le voilier se brise sur le sable d’une île.
D’une île ? D’un asile ? En tout cas la descente est rapide.
Ecoute bien docteur Gypsie !
Pilules, blouses blanches,Mogadon à la trappe !
Flacons, seringues, prison-somnifère à la trappe !
Schizo veut retrouver son rêve éveillé…Quitter ce quotidien d’eau plate...Retrouver son fidèle Guénolé et repartir au large de Penmarc’h là où les sirènes chantent “ Love ! Love ! Love ! ” avec Hendrix, Zappa, Morrison…Et les enceintes se réveilleront pour hurler :
“ Raconte-toi...comme tu veux...où tu veux...Le béton ? Assume-le...et balance ton délire ! Racontetoi...
parle-moi… parle-moi...je t’attends ! ”.
Remerciements à Alain Gallet et à Yann Kersalé pour avoir partagé l'histoire de ce groupe ainsi que pour les documents jamais publiés.
Alain Gallet s'est tourné progressivement vers la télévision, en parallèle avec la radio jusqu'en 1979 puis exclusivement à partir de 1983. Il a réalisé beaucoup de documentaires pour FR3 Ouest et s'est mis à la réalisation de films à compter de 1987.
Je vous recommande, pour découvrir en détail toute sa carrière, d'aller sur son site internet ICI ou en vous procurant son livre « Le journal d'un réalisateur de campagne ».
De nombreux ouvrages sont consacrés à ses réalisations.
Vous pouvez si vous êtes amateur de jazz écouter les albums de son nouveau groupe « Taho » et visiter le site du groupe ICI.
Fans de rock progressif, jetez-vous sur ce disque car « L'homme voilier » est un album grandiose qui mérite de figurer au Panthéon du rock progressif français.Bonne écoute.
Makhno
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